Ne t'avais-je pas prévenu que j'allais te saucer tout le weekend ?
En vérité, le vrai commencement de tout ça, c’est un jour d’avant covid noyé dans une période si brumeuse aujourd’hui dans mon esprit que je suis incapable de le dater. Ce devait être juste avant l’été ? ou juste après ? En 2018 ? ou 2019 ?
Une nouvelle personne rejoint l’agence de communication parisienne où je travaille alors. Elle s’appelle Laura, elle est parmi nous ce soir.
Nous ne sommes pas restées de simples collègues longtemps. Comme souvent dans la vie de Laura, tout est allé très vite.
Je manque de temps pour écrire ce texte. La déambulation commence dans 7h, et c’est loin d’être la seule chose que j’ai à faire avant le coup d’envoi. Comme toujours, j’ai repoussé les choses les plus importantes, les plus essentielles.
S’il n’y avait qu’un texte à écrire, c’était peut-être celui-là.
S’il n’y avait qu’un texte sur lequel il fallait être à la hauteur, c’était certainement celui-là.
Alors toute la semaine, j’ai inconsciemment probablement voulu attendre le bon moment. Celui où je serais frappée par l’inspiration et les bons mots pour dire toute l’ampleur frénétique de notre amitié. Le moment où ça coulerait tout seul sous mes doigts. Mais les choses les plus simples et les plus évidentes sont toujours les plus difficiles à écrire.
Et puis, est-ce que j’ai vraiment envie de dévoiler aux yeux de toutes et tous une des rencontres les plus précieuses de ma courte vie ?
J’en étais là de ces lignes quand tu es venue me prendre en vidéo pour la com’. J’ai détesté. Mais je l’ai fait. Tu as fini par un « C’est très mignon, c’est très toi. Merci d’avoir joué le jeu. » J’ai adoré.
Bref, ton énergie légendaire m’a presque redonné un peu d’inspiration alors que je panique devant la somme de tout ce que je voudrais encore mettre dans mon œuvre.
Reprenons… je voulais évoquer tous les souvenirs avec toi, retracer notre histoire commune… mais finalement, je crois que je préfère, dans une magnifique lapalissade acrobatique à la Georges Perec (encore et toujours), ne rien en dire.
Et donc ne pas dire que je me souviens…
… de cette pause thé dans l’open space où je t’ai annoncé que je venais de me faire larguer. Dans ma tête, tout commence là.
…des soirées films à JPT, armée de la liste cinéphile de Rémi (il y en a peut-être eu qu’une, mais dans nos rêves on aurait pu faire ça tellement plus souvent).
…de toutes nos autres sorties ciné.
…que tu m’as hébergé pendant la grève de la RATP fin 2019. J’écrivais alors « j’aime les cheminots » sur la vitre de ta salle de bain. Il me semblait que cette grève avait encore donné un coup d’accélérateur à notre amitié.
…qu’en guise de « secret santa » tu m’as organisé une chasse au trésor dans l’agence.
Et puis, un jour… tout s’arrête. Le covid distancie nos corps, dissocie nos rythmes et envies. Mais notre amitié se renforce. C’est le début des pauses thés en visio et des vocaux whatsapp qui deviennent des podcasts.
Et puis, quand on aurait pu enfin se retrouver, on s’est mutuellement aidé à partir. Alors ce nouveau rythme a continué à s’installer, tout comme notre amitié à se solidifier, en même temps que nos vies et nos êtres, à mesure qu’on faisait les choix les plus difficiles mais les plus nécessaires.
Avec toi tout est simple. Ou plutôt : tu simplifie tout. Et dieu sait qu’avec moi, c’est compliqué de simplifier. Et jour après jour, je vais de surprise en surprise. A chaque instant clé, je m’émerveille un peu plus de réaliser que deux être si différents peuvent être si semblables, ou que deux être si semblables puissent être si différents.
Maintenant, grâce à toi, c’est Yzeron et le Labs qui nous réunissent chaque année. Car un jour, tu m’as parlé de cette résidence, tu m’as fait cet immense cadeau : celui de me proposer de rejoindre cette folle équipe.
Et c'est aussi grâce à toi que j'ai pu, après deux ans à gérer la communication de la semaine, muer. Passer de l'autre côté. Oser le mot artiste.
Et c’est ainsi que tout commence ici. Avec elle, avec toi. Laura.
J'aurais eu mille autres choses à dire dans ce texte... Tout est là, en puissance dans ma tête. Mais tu sais déjà tout, et je sais que tout comme moi, tu as hâte du reste. Hâte de tout.